Liv est consultante et formatrice en UX Strategy et UX Design. Elle est l’auteur du livre 33 bonnes pratiques en UX Design, les fondamentaux de la psychologie numérique, aux éditions Eyrolles, préfacé par Nabil Thalmann, directeur du UserLab Intuiti.
Les utilisateurs sont de plus en plus exigeants vis-à-vis du design des écrans qu’ils consultent. Ils veulent des interfaces intuitives. Mais qu’entend-on justement par là ? Et, surtout, comment mettre toutes les chances de votre côté pour proposer un design qui soit compris, impactant et engageant ?
Je vous propose dans cet article quelques pistes concrètes et universelles pour faire adhérer vos utilisateurs à vos interfaces.
La divulgation progressive pour éviter la surcharge d’information
Tout d’abord, il vous faut proposer un design attractif, c’est-à-dire lisible et clair. Délivrer un message limpide, organiser ses écrans pour guider le regard, s’adapter aux raisonnements de vos utilisateurs sont autant de facteurs qui susciteront l’attention et l’intérêt. C’est la première étape à franchir avant de convaincre.
Prenons un exemple : la divulgation progressive. Il s’agit ici de dévoiler les informations petit à petit aux utilisateurs afin de bien focaliser vos utilisateurs sur les informations importantes.
Nous vivons dans une société où le nombre d’information à traiter est énorme et a fortement augmenté ces dernières décennies. Il semble normal d’être hyper-connecté et presque en permanence exposé à une grande quantité d’information. C’est l’infobésité.
Or, la capacité de traitement des informations atteint souvent ses limites. Nous ne pouvons accepter qu’une charge limitée d’information à traiter au même moment. On parle de charge cognitive pour faire le lien entre la complexité d’une tâche et la quantité de ressources allouées à cette tâche. Si la charge cognitive est trop grande, l’utilisateur est désorienté, perd le fil de ses pensées et peut même oublier son objectif.
Alors comment présenter l’information ?
La divulgation progressive est un bon moyen pour diminuer la charge cognitive tout en diffusant les informations nécessaires. Vous allez donc épurer au maximum vos interfaces pour ne présenter que les fonctionnalités ou informations pertinentes à l’étape en cours.
Dans la divulgation progressive, les informations ou fonctionnalités qui ne sont pas immédiatement présentes, peuvent être accessibles :
• via un menu,
• en scrollant,
• en cliquant sur un lien ou bouton
• ou en réalisant une action : par exemple, sur un site de réservation de billet d’avion, l’utilisateur sélectionne la date souhaitée de son vol.
C’est le cas sur de nombreux sites marchands : les étapes d’inscription, de choix de livraison, de paiement sont séquencées. Notamment les sites de vente de billets d’avion pratiquent la divulgation progressive depuis longtemps car l’achat d’un billet d’avion nécessite de nombreuses étapes (date, horaires, bagages, restrictions alimentaires, numéro de passeport, etc).
Sur les sites qui présentent un grand nombre d’information, la divulgation progressive est souvent employée. Par exemple, didacte.com propose une plateforme de formation pour les créateurs de contenu qui proposent du e-learning. Il y a de nombreux points à aborder pour convaincre les formateurs d’adopter la plateforme. Or, la page d’accueil propose peu d’informations aux utilisateurs. Pour en savoir plus, il faut faire défiler l’écran ou cliquer. Ainsi, les utilisateurs n’ont jamais trop d’informations à prendre en compte et ils ne sont pas découragés. Cela permet d’éviter la surcharge d’information.
Se concentrer sur deux moments clés de l’expérience
Ensuite, vous allez chercher à créer un impact. Créer un impact, c’est laisser une trace. C’est un souvenir de l’expérience, une trace durable en mémoire. Comment construire cette expérience pour susciter le plus d’impact ?
Prenez un moment pour vous remémorer vos dernières vacances. Que retenez-vous ?
Ce qui est vécu durant une expérience est différent du souvenir que nous en conserverons. Le plus important reste le souvenir de l’expérience et non l’expérience elle-même.
Le souvenir d’une expérience dépendant de deux choses : (1) le pic émotionnel et (2) la fin de l’expérience. Apportez donc un soin particulier aux pics émotionnels durant l’expérience et à la manière dont se termine l’expérience : laissez vos utilisateurs sur une note positive, ou préparez-leur une surprise. L’exemple que je cite régulièrement est l’animation proposée par Mailchimp lorsque vous vous apprêtez à valider l’envoi d’un mailing list. Le singe est en empathie avec vous et transpire de stress avec vous. Cette simple animation apporte énormément à l’expérience. Elle amène une touche d’humour à un moment qui peut être angoissant, et dédramatise ainsi l’envoi de la mailing list. Ensuite, elle témoigne d’empathie avec l’utilisateur, et rend l’expérience mémorable. De plus, cela est très intelligent car l’utilisateur termine son expérience d’envoi sur une note positive. Cela lui permettra de garder un souvenir très positif de l’interaction avec le site. Voilà notamment comment Mailchimp a conquis des milliers d’utilisateurs : en créant une expérience finale mémorable !
Utiliser l’influence sociale
Enfin, vous allez remporter l’adhésion. Vous savez maintenant proposer un design attractif et créer un impact, il ne vous reste plus qu’à rendre vos utilisateurs addicts. Rien de plus facile en utilisant ces quelques principes : utilisez l’influence sociale pour convaincre, humanisez vos interfaces pour créer l’émotion, et devenez plus persuasif pour embarquer définitivement vos utilisateurs avec vous et faire évoluer leurs comportements.
Il existe plusieurs moyens pour manier l’influence sociale comme technologie persuasive. Pionnier de la persuasion technologique depuis la fin des années 90, Fogg (2003) a travaillé sur les critères qui permettaient d’augmenter cette persuasion. Parmi ces critères, l’influence sociale est puissante car elle permet de créer des soutiens entre utilisateurs qui se ressemblent et qui ont les mêmes problématiques.
Voici les différents facteurs qu’il a identifié et qui constituent l’influence sociale : apprentissage social, comparaison sociale, influence normative, facilitation sociale, coopération, compétition et reconnaissance. Développons deux exemples : la comparaison sociale et la coopération.
Comparaison sociale : on utilise la comparaison avec les autres : l’utilisateur compare ses performances avec celle des autres. Il sera donc plus motivé pour faire mieux que les autres.
Par exemple, le site EDF présente la consommation en électricité de votre ménage et la compare à celle de ménage similaires, c’est-à-dire comportant le même nombre de personnes, le même type d’équipement (chauffage notamment) et avec une surface d’habitation similaire (voir figure ci-dessous).
Coopération : les êtres humains ont une tendance naturelle à coopérer, certaines applications ou sites peuvent tirer parti de cette tendance pour se soutenir les uns les autres, même s’ils ne se connaissent pas, mais s’ils partagent le même combat ou la même cause. C’est le cas des forums de discussion par exemple.
Afin d’aider les concepteurs d’interfaces à engager davantage leurs utilisateurs au travers de leurs designs, j’ai écrit le livre.