Ces derniers mois, un nouveau concept s’est immiscé dans notre vocabulaire, celui de Job-to-be-done. Venue d’outre-atlantique, l’approche “Job-to-be-done” est une méthodologie de définition de vos cibles, complémentaire à la constitution de personas, car davantage orientée résultats.
Initialement formalisée en 2007 par Clayton Christensen (Professeur à Harvard), l’approche gagne du terrain et doit vous inciter à remettre en question vos pratiques d’expérience utilisateur (UX), pour mieux les faire évoluer. Dans cet article, je vous partage comment notre agence digitale Intuiti intègre l’approche JTBD dans sa méthodologie de constitution de parcours utilisateurs.
Définition des Jobs to be done
La méthode des Jobs-to-be-done (JTBD) suppose de considérer nos utilisateurs comme des recruteurs, à la recherche du meilleur candidat (nos produits et services) pour accomplir un travail (le fameux job). Plutôt que de se concentrer sur l‘acte d’achat et son objet, on formalise la démarche de l’utilisateur autour du résultat attendu et de la solution envisagée.
En incitant à se concentrer sur le résultat plutôt que sur le produit, la méthodologie des JTBD fait écho aux mots de Ted Levitt : « Les gens ne veulent pas acheter une mèche de 60 mm, ils veulent un trou de 60 mm ».
Comment utiliser l’approche Jobs-to-be-done ?
Il n’y a pas de modèle précis de formalisation d’un Job-to-be-done. L’idée est d’exprimer, le plus clairement et objectivement possible, le résultat que l’utilisateur souhaite atteindre, ainsi que les raisons qui l’y amènent.
Exemple : « L’utilisateur souhaite arriver à l’heure au travail »
Il convient de disséquer cette affirmation selon 3 critères d’analyse :
- Aspects fonctionnels (pragmatisme) : il veut une solution rapide et fiable pour réaliser ses trajets chaque jour,
- Ressentis personnels (émotion) : il souhaite être serein dans ses trajets quotidiens,
- Perceptions et impacts sociaux (émotion) : il souhaite être perçu comme une personne ponctuelle et organisée.
Sur la base des informations extraites, vous devez imaginer une ou des solutions permettant de répondre au mieux à l’ensemble des facettes du job. A noter qu’un job est généralement découpé en sous-jobs pour constituer un reflet réaliste des attentes de l’utilisateur.
Quelles limites aux Jobs-to-be-done ?
Maintenant que nous avons clarifié les objectifs et fonctionnement des JTBD, que penser de leur application ?
L’outil est inspirant : la méthode des JTBD permet de se placer au plus proche de l’attente utilisateur et de prendre du recul par rapport au produit ou au service. En ce sens, elle est fondamentalement user-centric.
D’autre part, elle aura tendance à favoriser l’innovation et la différenciation. Considérer les critères émotionnels d’un JTBD incite à dépasser la simple réponse à un besoin pour réfléchir à la qualité globale de l’expérience vécue.
Néanmoins, dans la méthodologie des JTBD, les individus sont gommés au profit du job.
En se focalisant sur le job, le risque est de perdre de vue la singularité de l’utilisateur et de son contexte d’utilisation et, par conséquent, de proposer une expérience aseptisée. Une méthode peu satisfaisante alors que les professionnels de l’UX ambitionnent chaque jour de proposer des expériences utilisateurs toujours plus fines et personnalisées…
Si, seul, l’outil semble imparfait à nos yeux de designers d’expérience, il pourrait cependant habilement compléter la construction de Personas riches et complexes.
Notre retour d’expérience : comment Intuiti intègre les Jobs-to-be-done dans l’élaboration de Personas
Aujourd’hui, la formalisation de Personas est devenue une étape incontournable du cadrage d’un projet. L’exercice n’en reste pas moins complexe. Des Personas mal étoffés peuvent très vite prendre la forme de cibles marketing désincarnées, basées sur des données démographiques et statistiques qui ne reflètent pas l’ensemble des enjeux.
Chez Intuiti, nous avons choisi d’intégrer la méthodologie des JTBD dans l’élaboration de Personas, en vue d’améliorer leur qualité et leur pertinence. Elle nous permet de leur conférer une richesse fonctionnelle dès le début du cadrage.
Les Personas sont généralement conçus en deux phases :
1 – la définition du profil, du contexte d’interaction avec la marque / le produit / le service et des éléments majeurs de sa personnalité
2 – l’identification de ses micro-besoins quant à la marque / au service / au produit afin d’identifier tous leurs points de contacts
Combinées, ces deux phases permettent à nos clients de se projeter dans la réalité d’un cas d’usage parlant et réaliste. Le profil donne corps à l’utilisateur et induit sa spontanéité, tandis que la définition des micro-besoins anticipe déjà le déroulé fonctionnel des solutions à proposer.
D’autre part, cette seconde phase permet de s’attarder sur la temporalité des actions et réflexions de l’utilisateur. Nous croyons en effet fortement à la pertinence d’une approche non linéaire du parcours de l’utilisateur, focalisée sur ce que nous appelons des moments de consommation plutôt que sur un parcours nécessairement chronologique.
En résumé :
- la méthodo des Jobs-to-be-done (JTBD) est orientée besoins et résultats,
- par son pragmatisme, elle facilite l’innovation fonctionnelle mais peut pécher par manque d’empathie dans le design d’une expérience complète,
- combinée à la méthodo des Personas, elle bénéficie de l’incarnation qu’ils proposent et se place en garant de leur richesse fonctionnelle
A votre écoute !
Lien vers l’article original de Clayton Christensen et de ses co-auteurs : Know Your Customers “Jobs-to-be-done” (Harvard Business Review, 2016).