22.02.22
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Cet article est la retranscription écrite d’une capsule audio diffusée lors de la 2e édition des Audio Days. Pour en savoir plus sur cet évènement, rendez-vous sur audio-days.com. Vous pouvez également écouter la capsule à la fin de cet article.


Au passage, nous organisons un webinar sur le pilotage de campagnes d’influence marketing, dans le retail. Au programme, focus sur les tendances actuelles d’influence, les bonnes et mauvaises pratiques et les nouveaux outils qui simplifieront vos process… Un webinar co-organisé avec nos amis de chez Skeepers. Inscrivez-vous en cliquant sur l’image ci-dessous :


Bonjour, je suis Stéphane Marthe, Directeur de la transformation digitale du groupe King Jouet et Maxi Toys, qui représente environ 400 magasins en France, Belgique, Luxembourg et Suisse, et complété de 5 sites Internet. Le sujet que je vais traiter dans le cadre de cette capsule : être présent sur les marketplaces pour un retailer : opportunité ou menace ?

En effet, je vais partager avec vous un retour d’expérience en toute humilité, sur quelques années de présence sur quatre marketplaces majeures françaises et vous expliquer pourquoi nous avons choisi de nous en retirer. Avant toute chose, il est avéré que la croissance du e-commerce est portée par les marketplaces depuis quelques mois déjà et qu’elles deviendront incontournables dans les années à venir, qu’il s’agisse de marketplace B2B ou C2C, de neufs ou d’occasion. Je ne vous apprends rien si vous suivez les tendances du digital depuis quelque temps déjà à ce sujet. 

Sur le marché du jouet, qui me concerne plus directement, on a un taux de pénétration du e-commerce d’environ 25 à 30%, avec des croissances à deux chiffres tous les ans, essentiellement portés par les marketplaces et avec un taux de pénétration qui s’est accéléré avec les différents continents. Et les e-commerces continuent, année après année, à recruter des clients. On observe des changements d’habitudes de consommation des Français. Là, une fois de plus, je pense que je ne vous apprends pas grand chose. 

Pour autant, on y a été et on a choisi de s’en retirer et je vais vous expliquer pourquoi. Tout d’abord, la présence sur des marketplaces apporte des atouts assez intéressants. C’est tout d’abord un apporteur de business complémentaire à court terme très efficace compte tenu de l’audience très, très importante de ces marketplaces. Ensuite, c’est un modèle économique intéressant puisque c’est un modèle à la performance. Vous prenez peu de risques. Si vous faites du business, vous payez des commissions. Si vous n’en faites pas, vous ne payez pas de commissions. Et également un moyen intéressant de capter des datas et des signaux faibles, notamment sur les ventes qui peuvent parfois différer entre ce que vous vendez sur les marketplaces et ce que vous vendez chez vous et qui peut, concernant le marché du jeu, vous permettre, parfois assez tôt dans la saison, de détecter ce que seront les meilleures ventes par la suite dans la saison. 

Pour autant, les raisons qui font qu’on a choisi d’arrêter notre présence sur ces marketplaces, c’est tout d’abord le fait que sur ces marketplaces, on vend principalement nos meilleures ventes. Alors, assez logiquement, les produits les plus recherchés sont aussi les plus vendus sur les marketplaces. Donc, on vend beaucoup de produits chauds et quelque part, on nourrit nos principaux concurrents avec parfois des extrêmes. J’ai encore en tête l’anecdote du produit, l’Etoile de la mort de Lego où on a quasiment épuisé notre stock. On a vendu 100 pièces en 1h30, quasiment une vente par minute et ces produits n’étaient pas prévus pour être écoulés sur le marketplace. On n’avait pas protégé ce stock. On aurait préféré très largement les écouler dans nos magasins puisque c’est là qu’on a la rentabilité la plus intéressante. Là-dessus, je vous apprends rien concernant le business du retail. 

Ensuite, une autre raison pour laquelle on a choisi d’arrêter, c’est la charge côté service client. En effet, le fait de travailler avec ces marketplaces induit de travailler avec différents back office, de travailler selon des process qui sont différents de ceux déjà en place par rapport à la plateforme e-commerce, avec une politique commerciale vis à vis du client qui est assez radicale puisque les marketplaces considèrent que le client a toujours raison et donc très souvent, on nous demande de rembourser le client avant même d’avoir géré le litige avec lui. Donc, ce qui est un peu frustrant. Et puis, on a souvent des équipes assez courtes dans nos tailles de structure et donc c’est une charge supplémentaire qu’on leur fait supporter. 

Un des autres points, qui est probablement le plus décisif dans notre décision de se retirer, c’est la partie client, puisque le client avec qui vous faites affaire dans le cadre d’une vente sur le marketplace, ce n’est pas le vôtre, c’est celui de la marketplace. Donc vous ne faites aucune acquisition client dans le cadre de ces transactions. Et de la même façon que sur la partie produits, on nourrit nos principaux concurrents. Là, on nourrit en data notre principal concurrent sans pouvoir en bénéficier. 

Autre point qui a pesé dans notre décision : le comparatif qu’on a fait entre les commissions liées aux marketplaces et les coûts d’acquisition payants classiques. Alors, je partagerai pas de chiffres avec vous, mais en terme de rentabilité, on allait du simple au double, notamment par rapport au fait que dans notre business digital, on a 50% des transactions qui sont web to store et donc qui ne supportent pas de coûts logistiques et donc qui améliorent naturellement grandement la rentabilité par rapport au business des marketplaces qui supportent lui à 100% des coûts logistiques. 

Et puis, on avait également, d’un point de vue stratégique à l’époque, pris un vrai parti pris, à savoir notre stratégie de se servir du Web pour créer du trafic en magasin. Et donc à un moment donné, comme toute stratégie, il faut choisir ses combats. Donc on avait considéré que la présence sur ces marketplaces n’était plus forcément cohérente avec cette stratégie. D’autant que la vente en magasin reste pour un retailer plus rentable pour une enseigne. Donc, pour toutes ces raisons, à savoir les enjeux CRM dont je vous ai parlé, les ventes de produits chauds, la charge service client, la rentabilité, King Jouet a choisi de se retirer de ces marketplaces, quitte à se priver d’une source de revenus complémentaires, mais avec une rentabilité que je qualifierais de douteuse. 

En conclusion, à court terme, si vous cherchez un complément d’affaires efficace et rapide à mettre en place, très clairement allez-y. Par contre, bien penser à moyen terme, les impacts que ça peut avoir au niveau de vos organisations, au niveau de votre supply, de votre service client. Et encore une fois, de ce Graal qui est la data client sur lequel vous pouvez vous asseoir. Voilà.

Je ne suis pas non plus quelqu’un de totalement fermé sur le sujet. Il y a une alternative qui me ferait changer et qui commence à se mettre en place : les marketplaces web to store. Considérant que les marketplaces peuvent aussi servir à créer du trafic en magasin en proposant à l’internaute de venir chercher son produit en magasin sans supporter donc de coûts logistiques. C’est clairement une tendance qui pourrait faire changer d’avis King Jouet. J’espère que cette capsule, en tout cas, vous aura aidé dans votre réflexion sur le sujet et je reste à votre écoute si vous souhaitez échanger plus longuement sur sur ce sujet de présence sur les marketplaces et répondre à vos questions !

Comme ce média Decriiipt, les Audio Days sont une création originale de notre Groupe Iteractii et de Intuiti, avec le soutien de supers partenaires et sponsors. Vous souhaitez nous écrire ? Envoyez-nous un mail à l’adresse contact@groupe-iteractii.com.

Cette capsule audio est également disponible sur les plateformes suivantes : Deezer – Spotify – Apple Podcast