Cet article est la retranscription écrite d’une capsule audio diffusée lors de la 2e édition des Audio Days. Pour en savoir plus sur cet évènement, rendez-vous sur audio-days.com. Vous pouvez également écouter la capsule à la fin de cet article.
Salut, c’est Vianney Vaute de Back Market. La question du ton de voix, je vais l’orienter sur la question de comment préserver et faire grandir un ton de voix en même temps qu’une entreprise et donc dans des phases d’hyper croissance, ce qui n’est pas simple. C’est d’autant moins simple que je pense que ce qui a fait la spécificité et la force du ton de voix de Back Market, c’est sa sincérité. Cette sincérité procède de deux choses. La première, c’est que la question du ton de voix et du positionnement de la marque, ces deux questions ont été pensées, pas au même moment, mais dans le même mouvement, parce qu’on a eu la chance de penser ce qu’on voit au moment où on crée notre entreprise et où on se posait la question de savoir quelle est sa raison d’être. La raison d’être de Back Market, c’est d’être une alternative aux géants du neuf. Du coup, de ce positionnement d’entreprise en a découlé un positionnement sur le plan du ton de voix, puisque les géants du neuf sont du côté des machines, nous on est du côté des humains. Les géants du neuf sont incapables d’autodérision et nous on va faire des blagues. Les géants du neuf sont du côté de la performance, on va mettre des références culturelles que les gens vont pouvoir comprendre et ainsi de suite.
La question du ton de voix, elle a été particulièrement spontanée dans les origines parce que j’étais celui qui écrivait tout ce que la marque disait, c’était moi qui les écrivais. J’ai décidé de le faire de manière absolument naturelle sur le plan du copywriting. Avec le scale, évidemment, cette spontanéité-là, elle est potentiellement mise à mal, pour trois raisons. La première raison, c’est la multiplication des points de contacts. On passe d’un site, quelques emails, peut-être une page sur Facebook, à un arsenal beaucoup plus sophistiqué de points de contacts pour pouvoir parler à plus de monde et peut-être parler plus fréquemment. Ça peut être des notifications iPhone, ça peut être des films télé et ça continue d’être des emails avec un peu plus de fréquence et ainsi de suite.
Le deuxième point que le scale va interroger par rapport à la spontanéité du ton de voix, c’est la question des géographies. Comment est ce qu’on arrive à maintenir un ton de voix puissant et spontané quand on essaie de s’adresser aussi bien à des japonais qu’à des américains, en passant par des allemands et des espagnols ? Le simple fait de faire la liste, moi, m’interroge.
Et puis, la troisième remise en question, elle est sur une sorte de gravitation qui s’installe avec le temps et avec le scale, et donc avec l’argent qui prend de plus en plus de place. C’est une sorte de poids de prise de parole qui est à la fois un poids financier, puisque vous êtes forcément un peu moins spontané quand vous êtes sur le point d’inscrire ou de valider un script pour un film de 30 secondes qui va vous coûter plusieurs centaines de milliers de dollars, que quand vous écrivez un email. Et puis ce poids, il est aussi juridique quand vous devenez une marque de premier plan dans la vie des Français, qu’on essaie d’être, ça vient avec une forme de responsabilité qui n’existait peut-être pas il y a sept ans.
Du coup, la spontanéité est à risque pour ces trois facteurs. Et comment on y fait face ? J’ai là aussi trois réponses. La première est qu’elle a mis du temps à venir parce qu’elle était très paradoxale. Mais en fait, il faut assumer que pour maintenir un vrai niveau de spontanéité appréciable, il faut apporter de la structure. Cette structure-là, c’est notamment un outil que j’ai beaucoup traîné des pieds pour le voir produire mais qu’il y ait des guidelines de ton de voix, on peut en voir plein sur Internet. Et nous, on a développé une première itération il y a quelques mois et on est sans cesse en train de l’améliorer. L’idée, c’est que n’importe quel rédacteur ne soit pas dépendant de moi ou d’un historique de Back Market pour savoir comment parler au nom de l’entreprise. Cette structure, elle procède aussi d’un département qu’on a créé autour de la question du contenu et qui est responsable du ton de voix et de sa diffusion à travers quantité de points de contacts, qu’on s’adresse à un marchand, à un client en interne ou à un partenaire. C’est uniquement parce qu’on se sent solidifié par cette sorte de socle, par cette structure, qu’on va pouvoir maintenir un vrai niveau de spontanéité parce qu’on a l’impression de regarder dans une seule et même direction qui est partagée par tous.
Le deuxième conseil que j’ai à donner, c’est de défendre un vrai objectif de relation. Avec le scale, il y a une sorte de pression des résultats qui naît, qui est assez saine parce que c’est ce qui fait que notre boulot est intéressant et aussi qu’il y a toujours des enjeux auxquels faire face tous les jours. Mais par rapport à la question du ton de voix, c’est particulièrement pernicieux parce qu’on se met à avoir des intentions de vente qui prennent de plus en plus de place et qui vont prendre parfois potentiellement la place de la relation gratuite qu’on a avec l’utilisateur. Moi, j’ai toujours vu Back Market presque comme un prétexte d’une mise en relation entre nous et les gens. On aurait pu ouvrir un café, il s’avère qu’on a ouvert une place de marché. Mais les emails qu’on envoie sont autant d’occasions de raconter des histoires intéressantes, d’éveiller les consciences sur des sujets importants, parfois de faire rire, d’être gratuit, juste d’apporter une relation un peu intéressante dans la vie des gens. Et ça, j’ai le sentiment que ça devient une fonction de plus en plus importante qui prend de plus en plus de place, c’est comment je défends un objectif un peu gratuit de relation entre ma marque et les gens. Peut-être que ce n’est pas si simple à faire quand on n’a pas la casquette un peu autocratique du cofondateur, qui m’autorise parfois deux ou trois putschs. Je trouve ça déjà parfois dur de le faire en interne et je pense que c’est un combat qui mérite d’être sans cesse défendu et mis au premier plan.
Et le troisième conseil, et je finirai là-dessus, c’est d’accepter la prise de risque. Ce n’est pas un conseil très original, mais moi, je pense beaucoup à deux choses en tant que copywriter ou maintenant le type qui essaye de donner une vision copywriter chez Back Market. Je pense très fort à Jean-Paul II et à son « n’ayez pas peur ». C’est tout simple cette phrase mais avec le scale, vient beaucoup de peurs qui viennent justement des poids, des prises de parole sur le plan financier et juridique. Il faut réussir à garder une forme de légèreté, de désinvolture par rapport à ce qu’on est en train de produire, ce n’est pas simple, mais c’est absolument nécessaire cette désinvolture pour garder de la spontanéité. Et puis, je pense aussi très fort au Cybertruck de Elon Musk, son fameux camion électrique qu’il a sorti avec un design complètement futuriste et un peu fou par rapport à la catégorie. C’est du risque qui est parfait, c’est pas du risque où il y a un risque juridique énorme en allant contester le leadership d’un géant. C’est le risque du contraste, de la différence et de la singularité. J’ai eu une idée : un camion, ça devrait ressembler à ça, il n’y a pas de raison que j’ai adopté les standards absolument ennuyeux des producteurs de camions qui m’entourent. On essaye de maintenir un peu ce niveau de prise de risque, ce risque du contraste et de la singularité avec des idées qu’on essaye de maintenir pures, pas trop polluées par des intentions de vente et qui, en fait, font sans doute la différence.
Je pense, et je finirai là dessus, que la force du ton de voix de Back Market, elle procède d’abord un peu de la faiblesse de l’écosystème qui nous entoure et qui est à la fois l’écosystème du e-commerce, qui est quand même ultra standard et très transactionnel, et particulièrement quand on regarde la catégorie tech qui est tout entière centrée sur ses machines, ses petites performances. En fait, pour nous, ça nous a laissé un boulevard énorme pour se distinguer, avec peu de frais, juste en disant bonjour aux gens avec leur prénom. Et une petite blague sur Christian Karembeu !
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