Il y a quelques semaines, le directeur média monde de Adidas, Simon Peel, jetait un pavé dans la mare. Il était l’un des premiers à dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : beaucoup de marques, à commencer par le géant à trois bandes, ont surinvesti dans la performance média… et perdu de vue l’importance d’investir, en parallèle, l’image de marque.
La performance, un allié court-terme
Cette tendance qu’ont pu avoir certains annonceurs, essentiellement mass market, à privilégier la performance au détriment de l’identité se comprend tout à fait. En effet, la perf. est un allié court-terme majeur. Une raison d’ailleurs mise en avant par Simon Peel, justifiant l’enjeu de rendre des comptes rapidement à des investisseurs… quitte à épuiser le client final en l’assommant de publicités sur l’ensemble des canaux médias à disposition.
Difficile, dans ce contexte, de ne pas comprendre le choix fait par adidas de privilégier la performance et d’aboutir, au bout du compte, à un rapport de 77% pour la performance contre 23% pour le branding (alors que, comme le rappelle le média dans lequel Simon Peel a pris la parole, des travaux ont prouvé qu’une répartition 60/40 offrait les meilleurs résultats).
Sauf que nous sommes tous conscients qu’oppresser le client sous une foule de messages publicitaires court-termistes n’augure rien de bon pour les ventes long-termes de la marque.
Le branding ressort du placard
De fait, nous voyons de plus en plus de directions marketing ou communication réinvestir les notions de branding. En clair, retravailler leur message et leur identité, avant de les pousser. Cela peut paraître évident, mais la réalité de l’entreprise et des besoins de ROI font que ce travail préliminaire avait pu être mis de côté.
L’attachement à la marque, à ses valeurs, ses promesses sont des piliers pour le cycle de vie de l’entreprise. C’est ce qui crée de la stickyness, de l’engagement et la fidélisation. Si vous n’êtes pas clairs sur votre plateforme de marque, vous ne l’êtes pas non plus pour vos clients et prospects, ni sur ce que vous attendez de vos salariés. C’est une véritable colonne vertébrale, tout en découle facilement, tout est cohérent.
Selma de Fressenel, associée, Digital Jobs Management
Extrait du livre blanc « Refonte de sites, les bonnes pratiques pour 2020 », Intuiti, novembre 2019, 2e édition
Plus régulièrement, nous rencontrons des directions media assumer leur intérêt pour le branding. Une position qui faisait clairement « ringard » il y a encore quelques mois. Le branding relevait d’une forme de communication à l’ancienne, où l’on imaginait des communicants réfléchir pendant des heures à un message, sans réellement utiliser la portée du digital pour les diffuser, par manque de connaissances techniques certainement. Je fais partie de cette génération qui a les connaissances « web » pour pousser les messages et qui a pu bénéficier des opportunités offertes par le digital en poussant des messages rapidement travaillés, en obtenant des ROI élevés, parce que la concurrence était encore faible.
Mais ce temps est peut-être révolu. Aujourd’hui, la concurrence est telle que le push marketing a atteint ses limites. Difficile d’obtenir de bons coûts par clics si le message affiché et le contenu proposé ne sont pas haute qualité.
La solution est-elle d'allier branding et performance ?
Alors, forcément, la solution toute faite serait d’allier les deux : image de marque et performance. C’est ce qui fait notamment la force des DNVB : une marque forte et une utilisation poussée de la data à disposition pour exploser rapidement les ventes (voir à ce sujet l’interview de Pauline Laigneau de Gemmyo).
Mais est-ce aussi simple que cela pour d’autres typologies d’acteurs, en B2C comme en B2B ? Sans doute que non, puisque deux problématiques ultra connues dans nos métiers (ré)émergent :
- court-terme vs long-terme : c’était le sujet levé par Simon Peel de adidas, je ne reviens pas dessus
- mesurable vs non-mesurable : l’impact de la notoriété sur les ventes est souvent difficilement quantifiable qu’un investissement pur et dur sur de la performance. Le ROI du travail des directions marketing l’est donc également. Et donc, in fine, les moyens qu’une direction générale va donner aux DirMarket (effectifs, outils, salaires…).
Ce qui nous laisse avec cette conclusion : investir équilibré est bon pour la santé de la marque. Mais c’est toujours plus facile à dire qu’à faire.
PS : merci aux différents intervenants qui ont inspiré cette prise de parole. Pierre Lechat, Brieuc Charier, Jean-Michel Onillon, Benoit Zante, Selma de Fressenel…
Edit : depuis la parution de cet article, un autre annonceur a partagé un retour d’expérience similaire. Il s’agit de Gap pour la marque Old Navy.
Quentin Franque
Quentin est directeur marketing de notre agence Intuiti. Entre autres missions, nous accompagnons les marques dans la définition de leur mix-marketing.